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Les architectes du chaos
Les architectes du chaos
  • 17 Janvier 2025
  • | 1

Les architectes du chaos

En Haïti, le chaos n’est pas une simple conséquence des événements, mais un produit soigneusement façonné par des acteurs dont les décisions – ou l’absence de décisions – aggravent chaque jour la crise. À la tête de cette orchestration d’échecs se trouve le Conseil présidentiel de transition (CPT), dirigé par l’architecte Leslie Voltaire depuis octobre 2024. Présenté comme une solution temporaire pour sortir Haïti de l’impasse, le CPT s’est rapidement révélé inefficace et incapable de répondre aux défis urgents du pays.

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Anglais : The Architects of Chaos

Espagnol : Los arquitectos del caos

Créole : Achitèk yo nan dezòd

Un leadership chaotique

Créé en avril 2024, le CPT a suscité de nombreux espoirs sous la direction de Edgar Leblanc Fils, Coordonateur du parti politique Organisation du Peuple en Lutte (OPL). Mais ces espoirs se sont vite éteints. Les divisions internes, la mauvaise gouvernance, et les scandales de corruption ont transformé cet organe en une caricature de l’inefficacité administrative. En moins d’un an, le CPT est devenu un symbole d’impuissance, incapable de proposer des solutions concrètes à la crise politique qui paralyse Haïti depuis la chute du régime duvaliérites et qui s’est aggravée après l’assassinat du président Jovenel Moïse en 2021. La chute du régime duvaliériste a suscité beaucoup d’espoir, mais comme l’affirme Meudec, “À la poussée libératrice de 1986 a succédé une forme d’enlisement du processus de transition politique marquée par le retour de la corruption et de la violence” (Meudec 2007, 47). En effet, après environ 39 ans de “gouvernance démocratique”, le pays n’est que chaos et désolation.

Le pays reste sans élections depuis 2016, renforçant l’illégitimité des institutions. L’élite économique et politique contribue à ce blocage en refusant les réformes nécessaires pour instaurer un climat de confiance et de stabilité. Loin d’être des victimes, ces élites profitent du désordre ambiant pour maintenir leurs privilèges.

Une économie chaotique

Le chaos haïtien est autant économique que politique. Suivant le rapport de l’Institut Haitien de Statistique et d’Informatique (IHSI), le Produit Intérieur Brut (PIB) s’est contracté de 4.2% en comparant les deux derniers exercices fiscaux, passant de 592,7 Milliards de gourdes pour l’exercie fiscal 2022-2023 à 568,0 milliards de gourdes pour l’exercice fiscal 2023-2024. Selon l’IHSI, cette chute “constitue le plus fort déclin de l’économie, jamais enregistré, depuis la chute de 5,7% du PIB en 2009-2010, consécutive au séisme dévastateur du 12 janvier de la même année” (IHSI 2024, 4). Le pays termine l’année 2024 avec un taux d’inflation de 25,8% (IHSI 2024, 4). La survie quotidienne est devenue un combat pour la majorité des Haïtiens. Le commerce informel domine l’économie, représentant près de 80 % des activités, tandis que les investissements étrangers sont quasi inexistants.

Le Conseil présidentiel de transition, sous la direction de l’architecte Leslie Voltaire, n’a montré aucune vision stratégique pour relancer l’économie. Les plans économiques sont inexistants, et les fonds internationaux disparaissent souvent dans des circuits opaques, alimentant davantage la corruption systémique. Cette corruption n’est pas seulement le fait des politiques. En effet, les élites économiques et politiques, en contrôlant les secteurs clés comme l’importation alimentaire et énergétique ainsi que la sécurité intérieure, participent à la perpétuation de la pauvreté et de la dépendance.

Une situation sécuritaire chaotique

La violence des gangs est devenue le principal facteur d’instabilité dans le pays. Ces gangs dictent leurs lois, extorquent les citoyens, empêchent l’accès aux services essentiels et contraignent des milliers de personnes à fuir leurs domiciles. Selon le Groupe d’experts sur Haiti, le nombre de déplacées en Haïti est estimé à plus de 500.000 personnes au mois de juin 2024, soit une augmentation de près de 60 % par rapport à mars 2024 (Groupe d’experts sur Haïti 2024, 29).

Nous assistons aussi à un processus de transmission de la violence aux enfants. Recrutés par la force ou attirés par des promesses illusoires de pouvoir et de richesse, ces enfants deviennent à la fois victimes et instruments de violence. Le Groupe d’experts sur Haïti affirme que “l’enrôlement d’enfants âgés parfois de seulement 10 ans par les gangs a considérablement augmenté et les enfants pourraient désormais représenter jusqu’à 50 % de l’ensemble des membres des gangs” (Groupe d’experts sur Haïti 2024, 31). L’absence d’éducation, la pauvreté et le manque de perspectives sont les principaux moteurs de cet enrôlement massif et participent au processus de maintien du chaos.

La chaire de droit constitutionnel Monferrier Dorval, un geste de l’Université d’État d’Haïti, pour la préservation de la mémoire du professeur Dorval

La chaire de droit constitutionnel Monferrier Dorval est une initiative à haute intensité intellectuelle, prise par l’université D’Etat d’Haïti (UEH), via le leadership de son rectorat, en accord avec les dirigeants de la faculté de droit et des sciences économiques (FDSE). L’initiative a pour premier but d’honorer et de faire perdurer la mémoire du vaillant et brillant professeur Monferrier Dorval, assassiné dans des conditions troubles, il y’a de cela environ plus de trois ans. Et dans le but d’apporter une contribution scientifique au grand débat qui traverse la société haïtienne depuis une dizaine d’années autour de la nécessité de changer ou pas, la constitution de 29 mars 1987, amendée le 11 mai 2011. Ne devrait-on pas chercher à l’appliquer de préférence. S’il faut la changer, ce changement devrait-il être radical, sinon que devrait-il avoir en termes de changement au sein d’une nouvelle loi mère pour une meilleure organisation institutionnelle d’ Haïti. La chaire est scientifiquement présidée par le professeur Henri Marge. Dorléans, (actuel responsable de l’AFPEC), et est vice -présidée par le doyen de la faculté de droit et des sciences économiques, Me Eugène Pierre Louis. La Chaire se matérialise par un ensemble de conférences et de débats (15 au total), qui ont lieu dans les locaux de L’office de la protection du citoyen OPC, sous le nom de mercredi de la Chaire Monferrier Dorval. C’est en ce sens que pour la cinquième édition du mercredi de la chaire (qui a eu lieu ce mercredi 9 octobre 2024 à L’OPC, en présence du protecteur du citoyen, Me Renan Hédouville), l’attention a été mise sur l’éducation au sein du débat entourant la possible élaboration d’une nouvelle constitution pour Haïti. Cette 5ème rencontre s’est déroulée sous le thème de: "L’Éducation, Enseignement, Recherche, Science et Technologies". La conférence a été animée par trois grands du milieu intellectuel haïtien, dont deux éminents professeurs de l’UEH, en l’occurrence, Professeur Odonel Pierre Louis, directeur académique de L’école normale supérieure (ENS); le vice recteur de l’UEH, le professeur Jacques Blaise. Leurs interventions a été suivi de celle du directeur de l’institut national de la formation professionnelle (INFP) M. Dikel Delvariste.

Un avenir hypothétique

La jeunesse haïtienne, qui représente plus de 60 % de la population, est à la fois la principale victime de ce chaos et sa plus grande chance de redressement. Les acteurs politiques et économiques ignorent cependant ce potentiel, préférant exploiter cette force vive à des fins destructrices, comme en témoigne l’enrôlement massif des jeunes dans les gangs.

Pourtant, avec des investissements ciblés dans l’éducation, la formation professionnelle et l’entrepreneuriat, cette jeunesse pourrait devenir un levier essentiel de reconstruction. Les initiatives locales, soutenues par la société civile et les partenaires internationaux, doivent viser à offrir des opportunités viables à ces jeunes, afin de détourner leur énergie des gangs et de l’utiliser pour bâtir une société plus juste et solidaire.

Bâtir ou détruire ?

Le chaos que vit Haïti aujourd’hui n’est pas le fruit d’une fatalité. Il est le résultat d’une absence chronique de leadership, de la corruption systémique et de la complicité d’élites qui profitent du désordre ambiant. Les architectes du chaos ne sont pas des figures anonymes : ils occupent des positions de pouvoir et leurs décisions façonnent chaque jour l’effondrement du pays.

Pour sortir de cette spirale, une refonte totale des institutions et un renouvellement des élites politiques et économiques sont indispensables. Haïti ne pourra se relever qu’avec des leaders réellement engagés, en rupture avec l’habitus dominant, et une jeunesse mobilisée, engagée et combattante. Les architectes du chaos doivent céder leur place aux bâtisseurs de l’espoir, car seul un engagement collectif, édifié sur l’idéal de la liberté pour tous des Pères de la nation, pourra permettre à Haïti de retrouver sa dignité et sa stabilité.

Citoyen Ken

7 Janvier 2025

Références

Meudec, Marie. 2007. Corps, violence et politique en Haïti. Aspects sociologiques.. Aspects sociologiques, 14, 1. ⟨hal-01636285⟩: 1-27. https://hal.science/hal-01636285v1 United Nations. 2024. Rapport final du Groupe d’experts sur Haïti

Ministère de l’Économie et des Finances, Institut Haïtien de Statistique et d’Informatique. 2024. Les comptes économiques en 2024

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Vertières, Fort Mazi : Au delà des vérité historiques;

Si vous recherchez le mot vertière dans un dictionnaire français, vous ne le retrouverez pas de peur que le monde ne sache pas ce lieu représente le talons d’Achille de la plus puissante armée européenne. Qui plus est celle ci, venait de remporter avec succès la campagne de l’est. Les historiens français de l’époque effaçait ce lieu géographique sous les radars de l’histoire en raison qu’ils ne voulaient pas raconter l’histoire telle qu’elle est dans le sens d’expliquer la première grande humiliation de l’armée expéditionnaire française par des bandes d’esclaves qui étaient totalement ignorants dans l’art de faire la guerre encore moins dans le maniement des armes. Pourtant,ces analphaguerres, mettaient en déroute l’armée Napoléonienne, la plus puissante en ce temps là,à l’aide des moyens du bord. Cette armée expéditionnaire après avoir mis l’europe à genoux,allait connaître sa première mise en déroute par les esclaves dans ce lieu géographique, situé dans le département du Nord d’Haïti. Drôle d’histoire, cette ville n’est pas sur la liste des mots français alors que vu son importance historique, elle devrait placer au cœur de l’histoire universelle tant s’en faut qu’elle mettait fin à l’invincibilite de l’armée armée invaincue. Pour ne pas offenser les maîtres blanc, aucun dirigeant politique n’a jamais demandé pourquoi vertière ne figure pas dans aucun dictionnaire français? Pourtant, ils célèbrent à grande pompe cette bataille à chaque 18 novembre. Quelle hypocrisie historique chez nos dirigeants! Après vertière bien d’autres lieux historiques sont étranglés par les historiens afin de cacher les extrêmes d’atrocités des colons français sur les esclaves. C’est dans ce contexte d’étranglement historique qu’on ne mentionne pas le "fort Mazi" dans les manuels d’histoires scolaires. Celle-ci, est situé, à Petit-Goave, 2ème section communale ,localité Arnoux. Nous nous sommes tombés sur ce méga fort,lors d’un clinique mobile entièrement financé par la fondation Ernest Junior,une fondation caritative qui œuvre dans le social en particulier dans le domaine de l’art et de la musique.D’après les résidents, les plus anciens de cette localité,ce fort fut construit sur au moins 20 carreaux de terre par les colons . Ce fut un immense complexe militaire répartie en des compartiments, des avant-postes,des salles de tortues, des salles pour soigner les colons, une grande église catholique, un cimetière. Cepandant,on ne parle jamais de ce fort si bien qu’il est ignoré par les professeurs d’histoires de la ville de Petit-Goave. À coup sûr, la disparition voulue de ce fort sous les radars de l’histoire enterre les atrocités, les barbaries , les châtiments les plus inhumains des colons sur les esclaves. A bien scruter la réalité, tout semble vrai que c’est le plus grand fort qui n’ait jamais construit durant la période de la colonisation. Du reste, il semble probablement le plus fortifié par rapport à son importance. A rappeler que vertière existe seulement dans les manuels d’histoires scolaires haïtiens alors que le fort Mazi ne figure pas, encore moins dans les dictionnaires français ou dans les livres d’histoires. C’est ce qui explique que ce fort a été un lieu secret dans lequel les colons pratiquaient les crimes et les atrocités qui allaient au delà de l’entendement humain. N’est-il pas une velléité manifeste des historiens de cacher ce qu’était réellement cet immense fort construit sur au moins 20 carreaux de terre? Découvrez l’histoire d’Haïti : Un récit fascinant à explorer! : https://haitiwonderland.com/haiti/histoire/decouvrez-l-histoire-d-haiti--un-recit-fascinant-a-explorer/81

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